Un matin quelconque, vous enfilez vos bottes, ajustez votre sac et faites le premier pas. Vous ne savez pas encore que, au-delà des kilomètres, vous attendent des histoires enfouies, des symboles cachés et des traditions qui ont traversé les siècles.

Le Chemin de Saint-Jacques n’est pas seulement une route, c’est un musée vivant, un réseau de symboles et un miroir de l’histoire européenne. Si vous pensiez tout connaître, préparez-vous à découvrir quelques faits insolites sur ce célèbre sentier.

 

Divers itinéraires vers Saint-Jacques

Chaque itinéraire du Chemin de Saint-Jacques renferme des anecdotes, des symboles et des traditions qui le rendent unique. Il n’y a pas deux chemins identiques, et c’est là tout leur charme. Voici quelques faits insolites que vous ne connaissiez peut-être pas :

Avant de faire le voyage sur le Chemin de Saint-Jacques, saviez-vous qu’il existe plus d’une dizaine de chemins officiels reconnus par l’Office du Pèlerin ? Des routes intérieures aux sentiers côtiers, tous convergent vers Saint-Jacques, mais chacun vous confronte à des paysages, villages et défis uniques. Choisir votre chemin, c’est en réalité choisir une expérience personnelle. De plus, chacun possède sa propre histoire.

  • Sur le Chemin Ribadeo Saint-Jacques, la fin de la route du nord, vous verrez des falaises et des plages sauvages, mais il cache aussi un secret : l’accès au Mirador de Santa Cruz. Ici, la mer Cantabrique semble se fondre avec l’horizon, et certains pèlerins jurent avoir vu des dauphins les accompagner à l’aube. Non, cet animal ne vit pas dans la mer Cantabrique.

 

  • Le Chemin de Saint-Jacques Bilbao jusqu’à Santander mêle l’industriel au médiéval, mais ce qui est le plus curieux, c’est qu’il traverse trois provinces et deux communautés autonomes en à peine quelques jours.

 

  • Le Chemin de Tui à Saint-Jacques est l’un des itinéraires les plus spirituels. Son point de départ est relié par un pont international qui unit la Galice et le Portugal. Curieusement, ce passage entre pays est effectué à pied par de nombreux pèlerins, qui ressentent ainsi aussi une frontière émotionnelle.

 

  • Sur le Chemin Français, beaucoup de pèlerins ignorent qu’à la petite localité de Grañón se trouve une église où il est possible de dormir dans la sacristie, sur des matelas, partageant dîner, bougies et histoires. Une expérience austère et profondément humaine.

 

  • Sur le Chemin Primitif, considéré comme le plus ancien, il existe une section appelée « la Route des Hôpitaux », qui culmine à plus de 1100 mètres d’altitude. Au Moyen Âge, cette zone était parsemée de refuges pour pèlerins luttant contre la neige et le vent, et l’on ressent encore aujourd’hui ce mélange de rudesse et d’épopée.

 

  • Sur le Chemin Anglais, il était d’usage au Moyen Âge que les pèlerins venus des îles Britanniques arrivent par bateau. Même aujourd’hui, la route conserve des noms et tracés rappelant cette arrivée par la mer : un hommage aux anciens navigateurs de la foi.

 

Le Mont du Plaisir : l’émotion de la première vue

À environ 4,5 kilomètres du centre de Saint-Jacques-de-Compostelle, le Mont du Plaisir offre aux pèlerins la première vue des tours de la Cathédrale de Saint-Jacques. En ce lieu, d’innombrables marcheurs ont ressenti l’émotion et le soulagement d’apercevoir la fin après de longues journées.

Au Moyen Âge, une chapelle fut construite près du mont, où les pèlerins s’arrêtaient pour s’agenouiller en signe de reconnaissance d’être arrivés si loin. Beaucoup poursuivaient le chemin à pied, même s’ils avaient voyagé à cheval, en signe d’humilité et de dévotion avant d’entrer dans la ville.

 

Le Kilomètre 0 du Chemin de Saint-Jacques

Sur le Chemin de Saint-Jacques, le kilomètre 0 officiel se trouve sur la Place de l’Obradoiro, juste en face de la Cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle, où se trouve la tombe de l’Apôtre Saint-Jacques le Majeur. Ce point symbolise la fin du pèlerinage et c’est à partir de là que sont mesurées toutes les distances du parcours.

D’autre part, beaucoup de pèlerins poursuivent leur chemin vers le Cap Finisterre, connu comme la « fin du monde » dans l’Antiquité. Là-bas aussi, il existe un jalon qui marque un kilomètre 0 symbolique, utilisé pour indiquer le début ou la fin de cette extension du parcours. Bien que ce dernier ne soit ni officiel ni reconnu par l’Église, il revêt une grande importance pour ceux qui souhaitent prolonger leur expérience.

Ainsi, on peut dire qu’il existe deux points appelés kilomètre 0 : un officiel à Saint-Jacques et un symbolique à Finisterre, représentant chacun différentes étapes du voyage jacquaire.

 

La coquille Saint-Jacques : plus qu’un souvenir

La coquille Saint-Jacques est l’emblème universel du chemin et sa forme aux lignes convergentes représente les différentes routes qui convergent sur le parcours.

Historiquement, les pèlerins ramassaient ces coquilles sur les côtes galiciennes et les utilisaient comme ustensile pour boire de l’eau durant leur trajet. De plus, elle servait de preuve d’avoir accompli le pèlerinage et est devenue un signe distinctif des marcheurs dévots.

Une légende populaire raconte qu’un chevalier fut miraculeusement sauvé de la mer et apparut couvert de coquilles Saint-Jacques, ce qui a renforcé le symbolisme de cet élément comme signe de protection et de guide dans le voyage.

 

Le pèlerinage en bateau : une option officielle peu connue

Bien que la plupart des pèlerins parcourent le trajet à pied, il existe d’autres moyens officiellement reconnus pour effectuer cette route. Après la marche, le vélo et le cheval sont les modalités les plus courantes. Cependant, une alternative moins connue mais valide est le pèlerinage à la voile.

L’Office du Pèlerin accepte cette modalité à condition que certaines exigences soient remplies, comme naviguer au moins 100 milles nautiques et compléter à pied la dernière étape. Cette option offre une expérience différente et de plus en plus de personnes la choisissent.

Par exemple, au cours de la dernière année, près de 150 pèlerins ont terminé leur parcours en combinant navigation en bateau et marche traditionnelle.

 

La tendance des pèlerins à parcourir le Chemin à l’envers est en croissance

Avec la popularité grandissante, de plus en plus de pèlerins choisissent des itinéraires alternatifs pour vivre une expérience unique et personnelle. L’une de ces options est de parcourir le Chemin à l’envers par rapport au sens traditionnel, que ce soit en refaisant le trajet à l’envers après l’avoir complété ou en commençant la pèlerinage depuis Saint-Jacques-de-Compostelle vers d’autres destinations.

Cette pratique a des racines historiques, car au Moyen Âge il était courant que les marcheurs retournent par le même chemin. De plus, certains pèlerins prolongent leur voyage vers le Chemin Portugais jusqu’au Sanctuaire de Fátima, ou vers Finisterre et Muxía, explorant ainsi de nouveaux horizons.

D’autres encore apprécient le défi et l’originalité de le faire à l’envers, apportant une perspective différente à ce célèbre itinéraire.

 

Les flèches jaunes : un symbole moderne du Chemin de Saint-Jacques

Les célèbres flèches jaunes, qui guident aujourd’hui des milliers de pèlerins, ne faisaient pas toujours partie du parcours jacquaire. Leur apparition est relativement récente et résulte de l’effort d’Elías Valiña, un prêtre d’O Cebreiro.

Au début des années 1980, Valiña entreprit la tâche de revitaliser et baliser le Chemin, qui était en grande partie oublié et peu signalé. Pour faciliter l’orientation des marcheurs, il commença à peindre des flèches jaunes à des points stratégiques comme les croisements et les détours.

Cette initiative est devenue un élément clé permettant aux pèlerins de suivre la route en toute sécurité et confiance.

 

Le salut « Ultreia » : encouragement entre pèlerins

« Ultreia«  est un salut traditionnel entre pèlerins. Il vient du latin et signifie « Allons plus loin ! ». Ce terme, utilisé pour s’encourager mutuellement pendant la pèlerinage, apparaît dans le Codex Calixtinus, l’une des œuvres les plus importantes liées au parcours.

Quand un pèlerin saluait un autre en disant « Ultreia », la réponse était « Et suseia », ce qui signifie « Et encore plus loin ! ».

 

Le Botafumeiro : symbole de purification

Dans la cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle, le Botafumeiro est l’un des éléments les plus impressionnants. Ce grand encensoir, qui pèse 53 kilos et mesure 1,5 mètre, est balancé par une équipe de personnes lors de certaines cérémonies.

À l’origine, sa fonction était de purifier l’air de la cathédrale après l’arrivée des pèlerins, qui, après de longues journées de marche, n’arrivaient pas toujours dans les meilleures conditions.

 

La Fontaine du Vin à Ayegui

Dans la localité navarraise d’Ayegui, à côté du Monastère d’Irache, se trouve une fontaine très spéciale : la Fontaine du Vin. Cette fontaine, alimentée quotidiennement avec 100 litres de vin rouge jeune par la Cave Irache, offre gratuitement du vin aux pèlerins qui parcourent la route jacquaire.

La tradition a des racines historiques, car les moines bénédictins d’Irache avaient l’habitude d’offrir du vin aux marcheurs comme reconstituant. Officiellement instaurée dans les années 1990, la fontaine est devenue un symbole d’hospitalité et de joie, avec un panneau invitant à trinquer au bonheur.

Bien que le vin ne soit disponible que le matin et en quantités limitées pour éviter les abus, la fontaine offre aussi de l’eau pour ceux qui préfèrent se rafraîchir de manière traditionnelle. Elle est ouverte tous les jours de 8h à 20h, et ceux qui le souhaitent peuvent obtenir un tampon commémoratif dans les caves ou au Musée du Vin.

 

La Croix de Fer : laisser derrière soi les fardeaux

La Croix de Fer est un calvaire situé au point le plus élevé du Chemin de Saint-Jacques Français, à environ 1 500 mètres d’altitude, entre les localités espagnoles de Foncebadón et Manjarín, León. Elle est formée d’un poteau en bois d’environ cinq mètres de haut surmonté d’une croix de fer.

À sa base, au fil des années, s’est formé un monticule de pierres. Une légende raconte que lors de la construction de la cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle, il était demandé aux pèlerins d’apporter des pierres. En tout cas, la tradition consiste à lancer une pierre, venue du lieu d’origine du pèlerin, en tournant le dos à la croix pour symboliser qu’on a laissé le fardeau derrière soi.

 

Portomarín : Le village qui a été déplacé pierre par pierre

Portomarín, dans la province de Lugo, est un parfait exemple du mot « renaissance ». Le village possédait une incroyable église romane du XIIe siècle ainsi que d’autres bâtiments historiques qui, en raison de la construction du barrage de Belesar dans les années 60, ont été menacés par la montée du niveau de l’eau.

Pour les préserver, ils ont été déplacés pierre par pierre à un nouvel emplacement plus élevé, à l’abri de l’inondation. Cet effort monumental a permis de conserver le patrimoine historique et architectural du lieu.

 

Les coups de cloche de la Tour de la Berenguela

Dans la cathédrale de Saint-Jacques-de-Compostelle, la Tour de la Berenguela abrite une horloge qui, selon la légende, si à minuit les cloches sonnent 13 fois, le démon pourra régner en maître pendant une heure entière dans la ville. Ce mythe ajoute une touche de mystère à l’expérience déjà magique d’arriver à Saint-Jacques.

 

Le Jeu de l’Oie et le Chemin de Saint-Jacques

Une rumeur veut que le Jeu de l’Oie ait son origine dans le Chemin de Saint-Jacques. On dit que chaque étape du Chemin est représentée par une case du jeu, et que les oies symbolisent les lieux sûrs ou de repos pour les pèlerins. Cette théorie suggère que le jeu était un moyen ludique d’enseigner aux pèlerins les dangers et les refuges du Chemin.